Notre appel à l’unité de la France, intitulée : « Une politique enracinée dans le peuple » s’inspire de
l’enseignement social-chrétien et particulièrement d’un récent ouvrage du pape François : Un temps
pour changer (2020), qu’il a rédigé dans le contexte de la pandémie de COVID 19.
Le 15 avril 2021, par message vidéo, le pape François s’est adressé aux participants de la
conférence internationale « Une politique enracinée dans le peuple » (a Politics rooted in the
people) qui se tenait à Londres autour du livre Un temps pour changer (2020). Un ouvrage du pape François rédigé dans le contexte de la crise sanitaire. Cet événement était organisé par le
« Centre pour la théologie et la communauté » de la capitale britannique et réunissait les représentants de mouvements populaires et les organisations qui les soutiennent dans leur
mission : accompagner le peuple dans sa lutte pour « la terre, le toit et le travail », les trois « T » formulés par le pape François. « L’un des objectifs de votre réunion est de montrer que la vraie réponse au sommet du populisme n’est pas du tout l’individualisme, mais le contraire : une politique de fraternité, enracinée dans la vie du peuple », a-t-il notamment souligné dans son message. Un « populisme inclusif » en quelque sorte – selon le père Angus Ritchie (directeur exécutif du Centre pour la théologie et la communauté) -, auquel le pape François lui
préfère le mot de « popularisme ». Cependant, ce qui importe, « ce n’est pas le nom mais la vision », a-t-il poursuivi : « il s’agit de trouver des mécanismes pour garantir à toutes les personnes une vie digne d’être qualifiée d’humaine… » Une politique que le pape François nomme « la politique avec un P majuscule », « la politique en Interne tant que service, qui ouvre de nouvelles voies pour que le peuple s’organise et s’exprime ». « C’est une politique non seulement pour le peuple, mais avec le peuple, enracinée dans ses communautés et dans ses valeurs », a-t-il insisté. « Lorsque le peuple est mis de côté, il est privé non seulement du bien être matériel, mais aussi de la dignité d’agir, d’être le protagoniste de son histoire, de son destin… » a encore affirmé le pape François dans son message. « C’est pourquoi, pour l’Église, a-t-il relevé, il est impossible de séparer la promotion de la justice sociale de la reconnaissance des valeurs et de la culture du peuple, en incluant les valeurs spirituelles qui sont à la source du sens de sa dignité. » Et, le pape François de rappeler le souhait qu’il a émis dans son livre Un temps pour changer : « que tous les diocèses du monde aient une collaboration soutenue avec les mouvements populaires ».
Notre ambition est de permettre dans le contexte et la perspective de l’élection présidentielle de 2027, d’aider les Français à discerner ce qu’ils attendent précisément en termes de changements et d’accompagner les futurs candidats à l’élection présidentielle à bien les appréhender.
L’un des objectifs de l’IEP en 2024, est de contribuer à contenir l’essor du populisme car ce phénomène dévoie les notions fondamentales de « démocratie » et de « peuple ». Convaincu que l’individualisme favorisé par une économie globale, n’est pas une solution mais contribue au contraire à favoriser la radicalité populiste, l’IEP entend proposer une alternative : le popularisme. En effet, les sociétés démocratiques ont plus que jamais besoin d’être fondées sur une politique de fraternité, enracinée dans la vie d’un peuple.
Le popularisme est une doctrine politique conçue historiquement en Italie par Don Luigi STURZO qui a été l’origine du Parti populaire italien, qui constituera plus tard la démocratie chrétienne. C’est une école de pensée politique inspirée par l’enseignement social-chrétien. Le parti populaire démocrate français formé en 1924 s’était justement inspiré à sa création du popularisme de STURZO. Le popularisme vise deux principaux objectifs : D’abord l’idée que l’action travaille à une politique qui recherche le bien de tous les membres de la société (la recherche du bien commun) par opposition aux partis qui promeuvent le bien d’un groupe spécifique porté par une idéologie. Le second recherche l’unité où les personnes et les groupes, respectés dans leur dignité propre et leur conscience, soient solidaires les uns des autres (la recherche d’une société subsidiaire). Cependant, ce qui importe dans le popularisme ce n’est pas le nom du concept mais la vision, il s’agit de trouver des mécanismes pour garantir à toutes les personnes une vie digne d’être qualifiée d’humaine. Une politique avec un P majuscule au contraire d’une tentation politicienne qui serait portée par l’ambition d’un individu, d’un parti et le projet d’une idéologie.
La politique en tant que service, qui ouvre de nouvelles voies pour que le peuple s’organise et s’exprime, c’est une politique
non seulement pour le peuple, mais avec le peuple, enracinée dans ses communautés et dans ses
valeurs. C’est ce que Vaclav HAVEL avait défini dans son livre « le pouvoir des sans pouvoir » comme
une « politique antipolitique ».
La notion d’enracinement
C’est à une dynamique de l’enracinement spirituel et temporel que vous invite l’IEP. Le pessimisme général dans lequel nous vivons peut décourager certains : il a pourtant l’immense mérite d’interpeller les hommes politiques et les citoyens sur l’urgence de modifier leur regard sur notre société, d’employer les mots justes pour désigner les réalités qui s’offrent à nous. La crise du politique est une crise de la promesse et de l’action en même temps qu’un refus de la décence et de la mesure. Pour retrouver nos libertés vis-à-vis de l’Etat, des puissances d’argent et du politiquement correct, il est temps de restaurer les solidarités naturelles, le sens du bien commun et la liberté de l’esprit. C’est à quoi s’emploie, à sa mesure, l’IEP avec le développement de la « société Subsidiaire ». Pour notre jeunesse « l’enracinement » s’oppose au premier abord aux réalités de notre temps : mondialisation, réseaux, mobilité, multiculturalisme… Aux yeux de l’idéologie dominante, c’est un
mot interdit. Pourtant, surtout dans sa conception française, la racine ou plutôt les racines qui nous constituent ne relèvent pas de l’enfermement et de la régression mais participent d’une ouverture sur l’universel. L’identité, lorsqu’elle procède d’un enracinement et non d’un repli artificiel sur soi, est une des conditions du déploiement de la liberté de l’homme. Péguy défendait lui-même le principe d’un « arrachement raciné » de la pensée, c’est-à-dire d’une possibilité de l’héritage et de la transmission. C’est sans nul doute cette porte qui a été fermée à notre jeunesse, au nom d’une fausse égalité et d’un vivre ensemble tyrannique. Mais cette jeunesse exprime une nouvelle exigence et aspire à une nouvelle « société » qui lui permettra de retrouver son unité (en elle et entre elle). Avec cette jeunesse, il nous appartient aujourd’hui d’inventer une « nouvelle politique » où le rôle de l’Etat n’est pas d’imposer à tous, si besoin par la force, une conception ou une autre, mais de créer un cadre propice au discernement par chacun, dans le travail et l’engagement, de la manière dont il peut contribuer au « bien commun » dans sa vie personnelle, matérielle, intellectuelle, spirituelle, fraternelle.
Les Etats généraux du bien commun
C’est pourquoi l’IEP croit que dans la perspective des prochaines élections présidentielle de 2027 ceque doivent privilégier les futurs candidats ce n’est pas prioritairement la production d’idées ni la rédaction d’un programme mais bien rechercher une modalité et une méthode pour permettre au peuple d’exprimer sa volonté et par là retrouver pleinement son unité.
Comme les français, nous considérons que l’offre politique actuelle est décevante, le système politique impuissant, chacun s’interroge sur une alternative qui pourrait répondre à l’attente des français en proposant un projet qui sache préserver son unité et incarner une renaissance politique. Quel que soit le vainqueur de l’élection, nous pensons que la première année de son quinquennat devra être réservée à cet objectif : refaire l’unité. Et nous proposons une modalité : la convocation
d’Etats Généraux du bien commun pour l’unité de la France avec une méthode, l’exercice du débat contradictoire et en se conformant au principe de subsidiarité, c’est-à-dire en s’appuyant sur la société civile et par le bas. Seuls des Etats Généraux pourrons rénover notre démocratie et faire la preuve d’un courage et d’une volonté politique car il est impossible de séparer la promotion de la justice sociale de la reconnaissance des valeurs et de la culture du peuple.
En attendant 2027
Le président de la République, Emmanuel Macron, nous propose de son côté de participer aux travaux du « Conseil national de la refondation » réunissant des « forces politiques, sociales, associatives ainsi que des citoyens ». Cette initiative renvoyait explicitement au Conseil national de la Résistance (CNR), créé au printemps de 1943 pour rassembler les partis politiques et les mouvements de résistance et préparer la libération de la France. « Nous vivons un temps comparable », a ajouté le président de la République. Nous sommes d’accord sur le constat cependant pour l’IEP cette initiative est totalement contreproductive car emmenant de l’exécutif cela n’a pas la légitimité populaire comme le suggérerait le principe de subsidiarité. C’est à la société civile, elle-même, de porter cette intuition et initiative avec l’aide bien sûr (subsidium) de l’Etat et de l’exécutif. Nous l’avons exprimé auprès de l’organisme « CNR » dans le cadre d’une contribution, en lui proposant de se conformer à la bonne définition du principe de subsidiarité mais qui est resté sans réaction… Nous pensons donc important de lancer à l’inverse d’initiative du CNR, une mobilisation citoyenne, sans attendre, pour exprimer et incarner ce mouvement « populariste ». Il s’agirait de convoquer des « Assises du Bien Commun » en nous appuyant sur les clubs IEP créés dans 10 villes en France représentatives de ce qu’est aujourd’hui la France.
La situation aujourd’hui est très préoccupante par son niveau d’insécurité globale. Nous observons tous à quel point la société est fracturée et percevons, à la fois la souffrance et une colère dans le peuple. En effet, lorsque le peuple est mis de côté, comme cela a été le cas ces dernières années dans différentes circonstances comme dans la crise sanitaire, il est privé non seulement du bien-être matériel, mais aussi de la dignité d’agir, d’être le protagoniste de son histoire, de son destin. L’enjeu
principal de l’élection sera clairement au-delà de préserver l’unité, d’assurer la paix civile, qui est aujourd’hui menacée comme on l’a vu lors des dernières émeutes de juillet 2023.
Ludovic TROLLE
Pour une meilleure compréhension du sujet, n’hésitez pas à visionner le discours du Pape qui introduit cette notion