Comment réfléchir honnêtement à la mondialisation ? (Lettre philo-économique n°2)

par 1-03-2018Economie

Les débats économiques opposent souvent en France les adversaires de la mondialisation et les soutiens d’une « mondialisation heureuse ». Ce débat englobe une bonne partie des discussions sur la construction européenne, à juste
titre puisque l’Union européenne est avant tout un effort pour créer un grand marché européen. Mais les termes de ce faux dialogue doivent être critiqués. Leur simplisme ne rend pas compte des différents niveaux de réflexion à mobiliser. D’une part, la question est celle de la neutralité de l’économie en matière de morale. D’autre part, la question de l’impact de la mondialisation sur toutes les entreprises.

mondialisation économie

L’économie rentre-t-elle dans le champ de la morale ? (Question de philosophie)

Le philosophe André Comte-Sponville écrivait il y a quelques années que les reproches faits à l’économie venaient du fait que les mécanismes économiques ne tenaient pas compte de la dimension morale : une entreprise régie par des principes moraux ne peut tirer de ces principes un avantage déterminant dans la compétition économique. La mondialisation ne peut répondre à l’aspiration de chacun à la justice, puisqu’elle ne bénéficie pas nécessairement aux plus vertueux.

On peut aller plus loin : c’est une vérité de l’action humaine que certains comportements qui paraissent blâmables peuvent servir de justes causes, tandis que des intentions qui paraissent bonnes peuvent au contraire être guidées par
l’égoïsme. Dans ces conditions, on ne peut « moraliser » le marché, on ne peut que « convertir » des personnes à une morale qui n’a rien à voir avec le marché. Ce point était déjà bien analysé au début de l’ère chrétienne par Origène : « Si
l’on y réfléchit, on verra que ce qui est regardé comme bon peut être fait avec une mauvaise intention, et vicié sous l’empire d’une passion ; quant à ce que l’on dit impur, si l’on en use raisonnablement, il est possible de le compter comme pur. » C’est un commentaire de l’Evangile de Marc, 7, où Jésus affirme que l’impureté ne vient pas du dehors, mais du cœur de l’homme.

Quelles conséquences la mondialisation a-t-elle sur les entreprises, des plus petites aux plus grandes ? (Question d’économie)

Naturellement, cette réflexion inclut une réflexion sur le protectionnisme, particulièrement sensible puisque le libre-échange a fait partie des principes affirmés en 1945 comme à la base du « monde libre » qui venait de l’emporter sur les totalitarismes eux-mêmes fondés sur l’économie dirigée et autarcique. Il est bien admis aujourd’hui que le libre-échange n’est, ni en bien, ni en mal, un absolu :
– certaines entreprises trouvent dans la présence à l’international une protection contre les fluctuations de chaque marché national. Mais elles perdent leur indépendance lorsque leur capital est majoritairement livré aux fluctuations des bourses d’actions ;
– certaines entreprises peuvent être victimes d’accords de libre-échange lorsque le cadre national ne leur permet pas de soutenir la concurrence étrangère. Cette réalité vaut cependant aussi pour des entreprises peu soumises à la concurrence internationale. L’entreprise, si elle se développe dans le monde, doit pouvoir trouver des sources de financement qui préservent son indépendance. Si elle reste sur un marché local, c’est l’amélioration continue du cadre de son activité qui peut seule préserver sa dynamique. Ces deux enjeux appellent deux politiques bien distinctes qui ne se contredisent pas nécessairement !

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